LA DÉPÊCHE DU CCAPL – 4 mars 2022

La journée internationale des droits des femmes aura lieu le 8 mars prochain ; l’occasion pour nous de les mettre en avant !

Voici des articles qui, plus que jamais, nous rappellent l’importance de cette date…

Monde Arabe : Le nombre d’évènements ayant pour but d’inciter des adolescentes et des étudiantes à se voiler semblent augmenter. Cérémonies organisées au Maghreb, fêtes pour récompenser des jeunes filles fraîchement voilées en Tunisie et en Algérie, la campagne pro-hijâb ayant récemment été mise en place au sein du Conseil de l’Europe par les organisations fréristes (Frères musulmans) européennes,… Le phénomène semble témoigner d’une recrudescence de l’activisme islamiste qui fait du voile son fer de lance. Cet article vous invite à vous intéresser à l’histoire du voile, en contextes musulmans et ailleurs, afin de mieux en comprendre la complexité. Selon la chercheuse Leïla Tauil : « les femmes voilées dans leur grande majorité, convaincues de se soumettre à une injonction religieuse coranique, ignorent – comme d’ailleurs les féministes post-coloniales qui défendent le droit pour les femmes de porter le voile – la fonction discriminante initiale du voile des femmes libres à l’égard des femmes esclaves présente pourtant dans les sources scripturaires médiévales. » (Voir l’article de Leïla Tauil sur LeMonde-Arabe.fr)

Stand au Bourget lors de la Rencontre annuelle des musulmans de France organisée par Musulmans de France, ex-UOIF, branche française des Frères Musulmans, ici le 18 avril 2018 © Jacques Demarton & AFP

Tunisie : Des femmes ouvrent le débat sur la congélation des ovocytes. La pratique n’étant actuellement autorisée qu’aux femmes mariées ou aux célibataires sur indication médicale, de nombreuses Tunisiennes réclament une libéralisation de celle-ci. La chanteuse Nermine Sfar, véritable star des réseaux sociaux en Tunisie, a suscité le débat en conseillant aux célibataires occupées par des études ou leurs carrières professionnelles de préserver leur fertilité pour qu’un jour « elles réalisent leur rêve d’être mère ». L’avocate féministe Yosra Frawes réagit: « Grâce aux réseaux sociaux, il y a une libération de la parole, des sujets qui étaient tabous sont démocratiquement débattus ».
Fethi Zhiwa, chef de l’Unité de fécondation in vitro à l’hôpital de Tunis, estime que « la congélation sociétale se pose (…) parce qu’il y a un décalage entre l’âge biologique qui commande l’âge de la reproduction et l’âge sociétal qui commande l’évolution des carrières » (Voir l’article sur MiddleEastEye.net)

Des Tunisiennes manifestent le 6 mars 2021 à Tunis contre les violences faites aux femmes ainsi que pour leurs droits. Image d’illustration © AFP & Fethi Belaid

Somaliland / Somalie : Au Somaliland, le Covid-19 force les « coupeurs » à faire du porte-à-porte. La crise sanitaire a mis à rude épreuve les efforts déployés par les agents de santé et les militants pour mettre fin à ce que les Nations unies et tant d’autres appellent « les mutilations génitales féminines ». Aucune raison médicale ou religieuse ne justifie l’ablation des organes génitaux externes au Somaliland. Celle-ci est néanmoins bien ancrée dans les moeurs et ceux qui l’exercent ne comptent pas interrompre leurs activités, quitte à faire du porte-à-porte pour trouver des « clients ». Bien que cette pratique puisse provoquer des saignements excessifs, des problèmes pour uriner et accoucher, engendrer des infections voire la mort, aucun texte légal ne l’interdit… (Voir l’article sur LeMonde-Arabe.fr)

Safia Ibrahim effectue une démonstration, pour les caméras, des outils et techniques qu’elle emploie pour pratiquer la mutilation génitale féminine, une technique qu’elle a apprise à l’âge de 5 ans et pratiquée depuis 35 ans. Hargeisa, Somaliland, 7 février 2022. © Brian Inganga – AP

En vrac dans le monde arabe …

Afghanistan : La fabrique d’une famine. Dans ce pays de 650 000 km2, seuls 12 % des terres sont considérées comme cultivables (contre 60 % en France). Celles-ci sont très dépendantes de la pluviométrie mais aussi d’un complexe système d’irrigation, déstructuré en partie par la réforme agraire avortée de 1978 (menée à l’époque par le nouveau régime communiste). Mouvements massifs de déplacements forcés, demandes d’aides refusées,… Retour sur les évènements ayant plongé tout un peuple dans une situation d’insécurité alimentaire. (Voir l’article de Pierre Micheletti sur LeMonde-Arabe.fr)

Yémen : Nouvel enlèvement d’un membre de l’ambassade américaine par les Houthis. Il y aurait donc actuellement au moins 11 anciens membres du personnel de l’ambassade des États-Unis qui seraient détenus par le groupe rebelle. Cette nouvelle intervient alors que l’administration Biden envisage de désigner les Houthis ou certains de leurs dirigeants comme des terroristes, ce qui entraînerait des sanctions sévères de la part du gouvernement américain. Certains Américains et Yéménites soutiennent que cela pourrait dissuader les Houthis de mener des attaques et les pousser à entamer des pourparlers de paix. D’autres, tels que des organisations humanitaires et certains membres du Congrès démocrate, craignent que les sanctions financières associées à cette désignation n’aient qu’un impact minime sur les dirigeants Houthis et risqueraient surtout de faire fuir les fournisseurs et expéditeurs de denrées alimentaires du pays, ce qui pourrait provoquer la famine pour des millions de personnes. (Voir l’article sur LeMonde-Arabe.fr)

Crise ukrainienne et monde arabe

La semaine dernière nous évoquions l’impact de la crise ukrainienne sur le Moyen-Orient. Cette semaine, les médias ont publié plusieurs articles reprenant en détails la réaction diplomatique des différents pays arabes.

Tout d’abord, l’Egypte est aujourd’hui dans une situation diplomatique délicate : en effet, le pays s’efforce depuis plusieurs années de mener une politique étrangère équilibrée entre la Russie et les puissances occidentales. Ce faisant, elle entretien de très bonnes relations à la fois avec la Russie et l’Ukraine. Mais la position est encore plus délicate pour le Caire lorsqu’on sait qu’il importe 50 % de ses besoins en blé de la Russie et 30 % de l’Ukraine (Voir l’article de Ahmed Eleiba). On comprend donc aisément sa réticence à se prononcer sur la crise entre ses deux partenaires commerciaux.

Vladimir Poutine et Abdel Fattah Al-Sissi s’apprêtent au sommet Russie-Afrique 2019 (Sotchi, 24 octobre 2019). © Serguei Chirikov,  Pool & AFP

Les Émirats Arabes Unis évitent, eux-aussi, de condamner l’invasion russe de l’Ukraine. Selon Anwar Gargash (conseiller diplomatique du président Khalifa ben Zayed al-Nahyane), « prendre parti ne ferait qu’engendrer davantage de violence ». Les autres pays du Golfe sont tout aussi frileux en raison des forts liens économiques (Voir l’article de Middle East Eye) ainsi que des intérêts politiques convergents qui les unissent la Russie (Voir l’article de Middle Eat Eye).

© Twitter AFP

Toujours dans la région du Golfe, le prince héritier d’Arabie saoudite Mohammed ben Salmane a quant à lui proposé de mettre en place une médiation (Voir l’article de la RTBF). À la suite d’un entretien téléphonique avec Vladimir Poutine, MBS a fait savoir qu’il était « prêt à faire l’effort pour faciliter une médiation entre les deux parties ».

Autre puissance nucléaire à la réponse attendue : l’Iran. Téhéran est un partenaire stratégique et aussi militaire privilégié de Moscou. Beaucoup s’attendait donc à un franc soutien de la part de l’Iran. Il n’en fut rien et la réaction officielle a même été très « mesurée » : « Nous ne considérons pas la guerre comme une solution », déclare  le ministre des affaires étrangères, Hossein Amir-Abdollahian. Pour le pays des ayatollahs, la crise ukrainienne est cependant la conséquence des provocations de l’OTAN (Voir l’article de Shervin Ahmadi).

À travers de l’Ukraine, la Syrie revit – quant à elle – l’intervention russe sur son sol. D’un point de vue politique, une Russie qui tournerait le dos aux Américains et aux Européens signifierait le maintien du soutien Bachar al-Assad (Voir l’article d’Adlene Mohammedi). Pour la population en revanche, cela rouvre de vieilles blessures :

Point de passage d’Abou Douhour, en Syrie (4 avril 2018). © AFP & George Ourfalian

Pour l’Algérie en revanche, il semblerait que l’isolement de la Russie sur la scène internationale soit une aubaine : l’exploitation des ressources de gaz de schiste du Sahara, pourrait en effet permettre au pays de rester un producteur majeur (Voir l’article d’Hassan Haddouche).

Mais la crise ukrainienne touche surtout les populations ! Parmi elles, on retrouve des étudiants originaires Moyen-Orient et d’Afrique du Nord, actuellement en séjour d’échange en Ukraine : Marocains, Tunisiens, Libanais, Égyptiens, Palestiniens, … milliers d’étudiants arabes bloqués sous les bombardements (Voir l’article de Areeb Ullah et de Dario Sabaghi) qui – sans moyens financiers – sont incapables de rentrer chez eux !

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