LA DÉPÊCHE DU CCAPL – 11 février 2022

Argent, le mot sur toutes les lèvres …

Le célèbre Bitcoin continue sa conquête du monde. Marcel Younes, créateur de «Bitcoin du Liban» (la plus grande communauté libanaise de crypto-actifs sur Télégram) a annoncé que « sur notre groupe*, le volume des transactions représente désormais entre 2 et 3 millions de dollars par mois, contre un million avant la crise».  Il ajoute que «la communauté est en plein essor, on est passé de 200 à 1700 membres en moins d’un an […] ».  Le Bitcoin a pour ambition d’être un moyen de paiement décentralisé. L’engouement qui l’entoure semble donc naturel pour de plus en plus de Libanais ayant perdu confiance dans les banques à cause de la crise économique subie par le pays.  (Voir l’article sur LeCommerceduLevant.com)

*Les cartes de paiement libanaises étant refusées sur les plateformes de trading spécialisées en crypto-monnaies, les échanges se font sur des réseaux sociaux mettant en relation acheteurs et vendeurs.

© Pixabay

Toujours en lien avec la crise économique mettant à mal le Liban, la difficulté d’accéder au traitement pour les malades souffrant de cancers en raison des pénuries. L’association Barbara Nassar a organisé vendredi 4 février un sit-in à Beyrouth à l’occasion de la Journée mondiale de lutte contre le cancer. Les manifestants scandaient des messages tels que « Notre gouvernement nous tue » ou « Nous voulons un médicament pour le cancer et non pas un cercueil ». Charaf Abou Charan, président de l’ordre des médecins, a déclaré à L’Orient-Le Jour que le retard dans la livraison des médicaments est « essentiellement dû au fait que la Banque du Liban tarde à octroyer son accord préalable pour l’importation de ces produits subventionnés, faute de fonds ». (Voir l’article sur LOrientLeJour.com)

Scène macabre montée par l’association Barbara Nassar sur la place Sassine à Achrafieh, en guise de protestation contre les pénuries de médicaments pour le cancer, le 4 février 2022. © Layal Dagher

En Iran, c’est la grogne contre vie chère qui prend de l’ampleur. Depuis plusieurs semaines, des milliers de fonctionnaires iraniens descendent ponctuellement dans la rue pour exprimer leur colère face aux conséquences d’une inflation croissante ne permettant plus à beaucoup de familles issues de la classe moyenne de se nourrir correctement.  On estime que plus de 2000 enseignants se sont rassemblés la semaine dernière devant le rectorat local de Karaj, à l’ouest de Téhéran, tandis que d’autres avaient osé manifester directement devant le parlement. D’autres rassemblements auraient également eu lieu dans de nombreuses villes. (Voir l’article sur Ouest-France.fr)

En vrac dans le Monde Arabe et au Moyen Orient…

Iran : Un autre sujet délicat à aborder à propos de l’Iran est l’homosexualité. Deux hommes, identifiés comme Mehrdad Karimpour (32 ans) et Farid Mohammadi, viennent d’être exécutés après 6 ans d’emprisonnement. Le motif avancé est l’accusation de « sodomie » (terme employé par les autorités iraniennes pour qualifier les relations homosexuelles). Selon le média IranWire, il s’agit de la seconde exécution pour le même motif en sept mois. En Iran, l’homosexualité demeure illégale et est passible de la peine de mort. Le pays est d’ailleurs considéré comme un des endroits les plus dangereux au monde pour les personnes LGBT. (Voir l’article de LaLibre.be)

© Shutterstock

Irak : Doski Azad était une jeune femme transgenre kurde de  23 ans, membre de la communauté LGBTQI+ et maquilleuse de talent ! Elle aurait été assassinée par son frère qui a aujourd’hui fuit le pays.

Source : @Kurdistan Watch sur Twitter

Le cas de Doski Azad ne semble malheureusement pas être isolé, comme l’explique Zhiar Ali, un activiste LGBTQI+ :

« L’an dernier, une autre femme trans, Misho, a également été tuée par son frère, et on ne sait toujours pas si le meurtrier a été traduit en justice. Non seulement nous devons accepter le fait de pouvoir nous faire assassiner à tout moment, mais il est aussi probable que nos meurtriers restent en liberté ! »

Egypte: Le 9 mars 2021, le président Abdel Fattah Al-Sissi annonçait son envie d’inaugurer une nouvelle « capitale administrative marquerait la naissance d’un nouveau pays et la déclaration d’une deuxième République ». Aujourd’hui, alors que cette nouvelle capitable sort des sables du désert, certains se questionnent sur les tendances autoritaires et militaires de cette nouvelle « République » (Voir l’article de Laura Monfleur).

Vue des immeubles résidentiels en construction dans la « nouvelle capitale administrative » depuis la Tour iconique
© Khaled Desouki & AFP

Espagne – Maroc : Une des conséquences des tensions entre le Maroc et l’Algérie est l’approvisionnement du premier en gaz en passant par les territoires du second. En effet, depuis 1996, l’Algérie expédiait vers l’Espagne et le Portugal environ 10 milliards m² de gaz naturel / an via le GME (Gazoduc Maghreb-Europe). En contrepartie du transit du gazoduc, le Maroc recevait annuellement près d’un milliard m² de gaz naturel, soit 97 % de ses besoins. Cet accord n’a pas été reconduit en octobre 2021, laissant le pays sans livraison de gaz (Voir l’article de Middle East Eye).

 Le Maroc s’est alors tourné vers son autre voisin, l’Espagne, pour demander de l’aide : ce dernier a accepté et  va approvisionner le Maroc en gaz en inversant le flux du GME.

Liban : Le racisme est visiblement partout, même à la télévision libanaise. Dalia Ahmad, journaliste et présentatrice soudano-égypto-libanaise, a récemment reçu des injures racistes après un de ses reportages où elle critiquait Hassan Nasrallah (dirigeant du Hezbollah) et le gouvernement libanais. Certains internautes allant même jusqu’à la traiter de « chienne noire ».

Libye : Alors que les élections présidentielles (prévues fin décembre 2021) ont une nième fois été reportées, la tension ne cesse de monter dans le pays. L’actuel Premier ministre libyen par intérim, Abdelhamid Dbeibeh, a été victime d’une tentative d’assassinat raté : Dbeibah rentrait chez lui lorsque des assaillants encore non identifiés ont tiré sur sa voiture (Voir l’article d’Arab News).

Monde Arabe : Le marché de la lingerie est en pleine expansion au Moyen-Orient. Même si les souks arabes offrent depuis longtemps la possibilité de s’offrir des sous-vêtements féminins, des magasins spécialisés se développent de plus en plus au cœur des capitales arabes et galeries commerciales du Golfe. Derrière ce qui semble être une curieuse anecdote se cache peut-être un réel changement de perception dans le Monde Arabe. La fondatrice de « Madame Bijouxx », Sarah Al Abdulkareem, s’était déjà exprimée dans le Washington Post au sujet de cette évolution en dépit des préjugés bien tenaces sur le sujet.  Elle avait alors commenté qu’il « ne s’agit pas de sexe, mais de ce que nous souhaitons porter ».  (Voir l’article sur LeMonde.fr

Maroc : La semaine dernière, nous vous informions de la course contre la montre dans laquelle s’étaient lancées les autorités marocaines pour sauver Rayan, un petit garçon de 5 ans, tombé dans un puit asséché d’une trentaine de mètre.

Samedi soir, la foule amassée à proximité de la crevasse creusée par les secours a assisté au dénouement – heureux pensait-on alors … – du calvaire du jeune garçon. Très vite cependant, la nouvelle du décès de Rayan a plongé le village et tous ceux qui ont suivi cette histoire à travers le monde, dans un profond chagrin (Voir l’article de l’AFP).

Le ministère marocain de l’Equipement a d’ores et déjà annoncé un programme de recensement de tous les puits abandonnés ou clandestins (Voir l’article de Belga) :

« Pour que la tragédie de l’enfant Rayan ne se reproduise plus, le ministre de tutelle a donné des instructions strictes aux directeurs des Agences des bassins hydrauliques pour qu’ils réalisent un recensement complet des puits abandonnés »

Tunisie : Nouvel épisode dans la saga tunisienne ! On sait que la crise économique frappe de plein fouet la population et les retards de paiement n’arrangent rien !

Les fonctionnaires ont reçu leurs salaires de janvier avec plus de dix jours de retard. Il n’en fallait pas moins pour que les syndicats montent au créneau et force le président Kais Saied à intervenir (Voir l’article de Middle East Eye).

Notons également que le président Kais Saied a prononcé la dissolution du Conseil supérieur de la magistrature (CSM). Cette décision vient de supprimer un des derniers contre-pouvoirs institutionnels. Le président a souligné que la justice ne constitue pas un pouvoir mais une fonction d’état. Il aurait également réfuté toute tentative d’asservissement et déclaré au « monde » agir dans le cadre de la loi en ne cherchant qu’à « épurer » la justice. (Voir l’article sur MiddleEastEye.net)

Israël / Palestine / Émirats arabes unis : « Dubaï, Dubaï », la chanson satirique qui enflamme les réseaux sociaux. La comédienne Noam Shuster Eliassi se décrit comme Juive mizrahi, autrement dit Juive orientale. Elle met d’ailleurs en avant ses racines juives iraniennes et défend les Palestiniens. Derrière cet air faussement innocent se cache une réelle critique des liens entre Israël et les Émirats arabes unis. La comédienne commente : « En Israël, on a choisi d’être gentils avec les Arabes du Golfe, qui sont pourtant à 4 000 kilomètres d’ici. On a choisi de tisser des liens économiques avec eux. Mais en parallèle, nous préférons ignorer la question palestinienne […]». (Voir l’article sur RFI.fr)

2 thoughts on “LA DÉPÊCHE DU CCAPL – 11 février 2022”

  1. Merci à Nagi et à l’équipe pour cette opportunité bien structurée et avec ses liens pour les détails et sources.
    Une fois encore du beau travail
    Je ne pourrais pas assister à la conférence sur les racines de l’Islam (ainsi que Annie) ; étant invité de longue date à Bruxelles

    1. Nous vous remercions pour votre commentaire. C’est toujours un réel plaisir d’avoir un retour positif sur ce que nous faisons. À très bientôt pour découvrir la prochaine dépêche!
      L’équipe

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