LA DÉPÊCHE DU CCAPL – 27 janvier 2023

En vrac dans le Monde Arabe et au Moyen Orient…

Algérie : Le pays respecte-t-il ses minorités religieuses ? Certains en doutent : le secrétaire d’État américain, Anthony Blinken – se basant sur un rapport de ses services – a placé l’Algérie dans la liste des pays à mettre « sous surveillance » pour non-respect des libertés religieuses, à savoir à l’encontre des Algériens ayant choisi une religion différente de l’islam sunnite (Voir l’article d’Ali Boukhlef).

Certains citoyens algériens se sont confiés à Middle East Eye au sujet des pressions de plus en plus fortes pour adhérer à la religion d’État :

« Des citoyens ont été poursuivis et emprisonnés pour avoir exprimé une opinion ou exercé leur culte, beaucoup d’églises ont été fermées pour faute d’autorisation des administrations compétentes, la communauté ahmadie fait toujours l’objet d’une persécution dans plusieurs wilayas [préfectures] du pays », indique à Said Salhi, vice-président de la Ligue algérienne de défense des droits de l’homme (LADDH)

Notons que la Ligue a depuis annoncé avoir été dissoute à son insu par les autorités algériennes lors d’un procès tenu en son absence (Voir l’article de Middle East Eye):

La LADDH estime qu’elle « paye » son « engagement pour la démocratie, les libertés et les droits humains ».

Arabie saoudite : L’ancien secrétaire d’État américain de l’administration Trump, Mike Pompeo, revient sur l’affaire du journaliste saoudien assassiné, Jamal Khashoggi, en des termes qui ont provoqué un tollé.

Pour rappel, Jamal Khashoggi (détracteur du pouvoir de la famille royale saoudienne et collaborateur du quotidien américain Washington Post) a été assassiné en octobre 2018 à l’intérieur du consulat d’Arabie saoudite à Istanbul.

Mike Pompeo défend les relations avec l’Arabie Saoudite et se félicite même d’avoir pu faire un doigt d’honneur au « Washington Post et au New York Times » en se rendant à Riyad quelques jours après l’assassinat de ce dernier. Pire encore, Pompeo ironise sur le statut de « journaliste », affirmant que les médias « ont martelé l’histoire très fort parce que Khashoggi était un journaliste » (voir article écrit par Mee).

« Ce qui a vraiment rendu les médias plus fous qu’un végétarien dans un abattoir, c’est notre relation avec l’Arabie saoudite », écrit Mike Pompeo. © AFP & Andrew Caballero-Reynolds

France – Syrie : De nombreuses femmes et enfants de l’État islamique sont actuellement détenus dans des camps de prisonniers en Syrie. Parmi eux, se trouvent des ressortissants français que le gouvernement de l’Hexagone ne semblait pas pressé de rapatrier jusqu’alors.

Or, l’ONU a affirmé une nouvelle fois que Paris enfreignait la Convention contre la torture et a rappelé l’obligation de protéger les femmes et les enfants de nationalité française détenus en Syrie (Voir l’article de Le Monde & AFP).

La France, également mise sous pression par des organisations internationales et des familles, a depuis procédé au rapatriement de 15 femmes et 32 enfants qui étaient détenus le nord-est de la Syrie (Voir l’article de l’AFP). Ceci met fin à sa politique du « cas par cas ».

La secrétaire d’Etat à l’enfance, Charlotte Caubel, a d’ailleurs détaillé l’évolution du protocole pluridisciplinaire de suivi de ces enfants dans une interview donnée au journal Le Monde (Voir l’article de Christophe Ayad). Rappelons qu’il reste une cinquantaine de femmes et une centaine d’enfants français dans ces camps de prisonniers.

Israël : La situation israélienne inquiète de plus en plus, tant en son sein qu’à l’international. En Israël tout d’abord, le pays a connu la plus forte mobilisation populaire depuis que Benyamin Nétanyahou est de retour à la tête du gouvernement.

Le 14 janvier dernier, quelques 70.000 manifestants sont descendus dans les rues de Tel-Aviv, afin de crier leur désaccord avec le glissement politique le plus à droite de l’histoire israélienne.

Une semaine plus tard, le 21 janvier, ils étaient près d’une centaine de milliers, parmi lesquels l’ancien premier ministre Yaïr Lapid, à manifester pour dénoncer les atteintes à la démocratie dont ils accusent la coalition au pouvoir (Voir l’article de Le Monde et de l’AFP).

À L’international, les voisins de l’État hébreux – comme la Jordanie – s’inquiètent également de la montée des tensions dans le pays (Voir l’article de Mohammed Najib). En visite à Amman, le premier ministre israélien a été contraint de s’expliquer au sujet de la visite d’Itamar Ben-Gvir sur l’esplanade des Mosquées à Jérusalem, dont la monarchie jordanienne est la gardienne (Voir l’article de Louis Imbert).

Pour preuve, le 26 janvier 2022, l’armée israélienne a mené une opération militaire d’une particulière violence dans le camps de réfugiés palestinien de Jénine, au Nord de la Cisjordanie occupée, faisant au moins neuf morts et vingt blessés. Le gouvernement israélien a lui-même qualifié cette attaque d’ « opération d’envergure » (Voir l’article d’Oumma.com).

Liban : La justice sur le devant de la scène au pays du Cèdre.

D’une part dans le cadre de l’enquête sur le patrimoine du gouverneur de la Banque du Liban, connue sous le nom d’ « affaire Salamé ». Des avocats “anticorruption”, au Liban mais aussi en Europe, en sont convaincus : on pourrait se diriger vers l’ouverture d’un procès pour blanchiment d’argent contre le gouverneur de la Banque du Liban (BDL), Riad Salamé (Voir l’article d’Hélène Sallon).

Riad Salamé, gouverneur de la Banque du Liban, à Beyrouth, le 20 décembre 2021. © JOSEPH EID & AFP

L’autre grande affaire judiciaire du Liban est sans conteste l’enquête sur l’explosion du port de Beyrouth. Nouveau rebondissement, près de deux ans et demi après le drame : les dix-sept personnes suspectes, en détention, seront libérées sur ordre du procureur général du Liban. Un coup dur dans une enquête au point mort depuis plusieurs années (Voir l’article de LeMondeArabe.fr).

Une justice qui semble toujours avoir du mal à être efficiente et qui a pour conséquence une perte des Libanais en leur élite dirigeante gangrenée par la corruption et responsable – selon eux – d’un effondrement économique sans précédent.

Libye : La cheffe de la diplomatie du gouvernement de Tripoli a déploré dimanche l’absence de nombreux pays membres à une réunion de la Ligue arabe, signe des divisions régionales persistantes dans ce pays d’Afrique du Nord.

Cette dernière a regretté « la position de certains Etats qui se sont absentés », faisant part de sa « déception » face à la faible participation : seuls cinq des 22 membres de l’organisation panarabe ont dépêché leurs chefs de diplomatie, tandis que d’autres ont opté pour un niveau de représentation moins élevé. Les grands absents étaient l’Egypte, les Emiraties arabes unis et l’Arabie Saoudite (voir article écrit par AFP)

Maroc : Le prince marocain, surnommé le « Prince rouge », cousin germain du roi Mohammed VI, a été refoulé une seconde fois à l’aéroport de Tunis alors qu’il devait participer à une conférence sur la démocratie.

Les autorités tunisiennes n’auraient pas apprécié l’article publié par ce dernier,  intitulé « Le triomphe fragile des contre-révolutions arabes » (voir article écrit par Mee).

Hicham Alaoui avait publié récemment un article dans Le Monde diplomatique évoquant « l’autoritarisme césariste de M. Saied ». © Twitter

Yemen : « Etre ou ne pas être », le célèbre monologue d’Hamlet de William Shakespeare a été mis en scène dans une adaptation inédite au Yémen.

Entre dilemmes moraux et lutte de pouvoir tragique, cette pièce a un écho puissant au Yémen, le pays le plus pauvre de la péninsule arabique et embourbé depuis plus de huit ans dans un conflit sanglant opposant les combattants pro-gouvernement aux Houthis.

Organisées en partenariat avec le British Council, les dix représentations d’Hamlet ont fait salle comble, début janvier à Aden (ville du sud contrôlée par le gouvernement et devenue sa capitale temporaire après la prise de Sanaa par les Houthis en 2014)

« La plupart des réactions sont bonnes et prometteuses » se réjouit le metteur en scène de la pièce, Amr Gamal (voir article écrit par AFP).

La troupe se produit dans l’enceinte du Parlement d’Aden, un bâtiment historique qui date de la forte présence coloniale britannique. © AFP & Saleh al-Obeidi

Et ailleurs…

Allemagne : Doit-on qualifier de « génocide » les massacres perpétrés par l’organisation Etat islamique à l’encontre des Yézidis d’Irak et de Syrie ? Oui à l’unanimité, selon les députés présents au Bundestag allemand ce jeudi 19 janvier.

« Plus de 5 000 Yézidis ont été torturés et brutalement assassinés par l’El, principalement pendant l’année 2014 », souligne la résolution adoptée par le Bundestag.

La coalition gouvernementale précise : les hommes furent « contraints de se convertir et, en cas de refus, immédiatement exécutés ou déportés comme travailleurs forcés », les jeunes garçons « envoyés dans des écoles coraniques, enrôlés comme enfants-soldats ou utilisés comme kamikazes », et les femmes « réduites en esclavage, violées ou vendues » (voir article écrit par Thomas Wieder).

Suède-Turquie : Samedi 21 janvier, dans le cadre d’une manifestation autorisée par la police suédoise à proximité de l’ambassade de Turquie, Rasmus Paludan, chef du parti danois raciste et islamophobe, a une nouvelle fois brûlé un exemplaire du Coran. Cette fois-ci, il voulait dénoncer les négociations pour l’adhésion du pays à l’OTAN.

L’autorisation donnée à cette manifestation anti-islam avait elle-même déjà suscité un incident diplomatique avec Ankara, qui a qualifié la provocation de Rasmus Paludan de « crime de haine manifeste » et annulé la visite du ministre suédois de la Défense Pal Jonson (voir article écrit par Mee et agences).

Des manifestantes brandissent un exemplaire du Coran devant le consulat de Suède à Istanbul, le 22 janvier 2023, pour protester contre l’autodafé du leader d’extrême droite Rasmus Paludan. © AFP & Yasin Akgul

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